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Les Jeudis de l'Hémicycle
Prises de parole du public


Les "Jeudis de l'Hémicycle" sont nés suite au constat qu'il y avait un déficit de démocratie directe au niveau du Parlement francophone bruxellois. Ces Jeudis ont donc pour mission de redonner ce sens à l'Assemblée, à savoir, être au plus près des sujets de citoyenneté qui traversent notre société.

Dans ce cadre, des adultes fréquentant les Ateliers du Soleil ont pris la parole pour exposer leur parcours de vie au Parlement autour de deux thèmes: le soutien scolaire à Bruxelles (25/4/13) et l'alphabétisation à Bruxelles (23/5/13).



Le soutien scolaire à Bruxelles
25 avril 2013


parlement
Lien: site du Parlement francophone bruxellois





Rachida C.


Je m’appelle Rachida.
Je suis une maman séparée. Mère de deux enfants de 9 et 12 ans.
Avant d'inscrire mes enfants en école de devoirs, ils avaient des difficultés en matière scolaire, des difficultés à la maison, pour faire leurs devoirs, pour préparer des contrôles, des examens. Après, un de mes enfants a dû doubler une année.
Moi, en tant que parent, j'étais vraiment angoissée. J'ai dû chercher une solution, une aide dans une école de devoirs. Il n'y avait pas de place, mais une liste d'attente pendant deux ans. Entre temps, mes enfants étaient toujours en échec. J'ai dû me diriger vers leur école, chercher à comprendre. La seule chose qu'ils avaient à me dire, c'était qu'un de mes enfants devait voir un psychologue. Moi, en tant que maman, je savais que ce n'était pas la solution, qu'il avait besoin d'un soutien. Après l'inscription dans une école de devoirs, c'était vraiment un soulagement.
Moi, en tant que maman, je ne savais pas faire ça avec eux. Parce que je n'ai pas terminé mes études. Et c'était vraiment angoissant pour moi et mes enfants. Ici, ils font leurs devoirs. Ils font aussi d'autres activités, des sorties. Qu'ils aiment ou qu'ils n'aiment pas, ils essaient. Par exemple, mon garçon n'aimait pas chanter. Aujourd'hui il aime bien parce qu'ils leur font découvrir. Ils leur montrent qu'ils peuvent aimer ça. Avoir un goût dans tout. Et chaque trimestre, ils changent d'activités.
Et les animateurs ne les jugent pas. Ils les poussent à comprendre. Les animateurs sont la pour les aider. Ils font ça avec plaisir. Et la directrice n'est pas là uniquement comme directrice. De temps en temps, elle regarde leurs devoirs, elle passe pour leur montrer quelle est la ligne directrice, qu'on ne doit pas avoir peur d'elle, qu'on peut être soulagé. Et pour nous aussi, en tant que maman, elle nous informe de ce qui se passe. Par exemple comme dernièrement, pour préparer l'entrée en première secondaire. Comment on doit remplir les papiers. Et maintenant, je suis sûre que mon fils va réussir son année, ses études et sa vie, pas comme moi en tant que maman.
J'ai vu dans leur bulletin qu'ils ont évolué. Et surtout le grand, je vois qu'il veut arriver à quelque chose de bien. Ils avaient besoin de quelqu'un d'autre. En dehors. Pas à la maison où leur maman devait être enseignante. Et voilà, je suis soulagée et très satisfaite.  Résultat, maintenant, mes enfants ne sont plus en échec. Je peux avancer. Quand ils rentrent à la maison, ils me retrouvent, en tant que maman, pas en tant que professeur. Avant, moi, je devais m'angoisser, eux étaient angoissés. Ils avaient peur en rentrant à la maison que leur maman n'ait pas compris la matière.
Et quand à l'école, le directeur nous a convoqués, on était stressé. Il nous a dit qu'ils ont évolué. Qu'il est vraiment content de nous. Et moi, quand il m'a dit ça, j'étais vraiment contente. Et même mes soeurs, mes amis me disent franchement que mon aîné a évolué. Tu as un grand garçon!
Moi, je trouve, par rapport à avant, que mes enfants sont vraiment soulagés. Les animateurs sont là pour eux. Ils montrent une complicité. Quand ils entrent, c'est toujours "bonjour " à chaque enfant avec la main. Ils les regardent dans les yeux. Et quand ils ressortent, c'est à eux de dire au revoir. Parce qu'il y a aussi l'éducation en école de devoirs. Il apprend aussi à parler, à écouter, à s'exprimer correctement. Je suis vraiment épanouie. C'est pendant la jeunesse qu'on peut apprendre le plus de choses. Ce n'est pas après. C'est vrai que ce n'est jamais trop tard mais... Quand on grandit comme ça, c'est bon. Alors, j'ai envie de leur donner cette chance-là, parce qu'il y a des gens qui sont là pour ça, qui ne nous jugent pas. L'école de devoirs m'a aidée à comprendre certaines situations. A l'école, "tu n'oses pas dire ce que tu as sur le coeur".
Moi, je suis en train d'avancer. Aujourd'hui, ils rentrent. Ils lisent un livre. Et puis, ils mangent. Et puis, le temps d'un petit calin, de parler avec eux avant de dormir. Ce sont encore des enfants! Ils ont besoin de 9 à 10 h de sommeil les enfants. Quand les enfants vont bien, nous, on va bien!





Rachida, maman d'Ilyas et de Bilal




Marie-Rose et Rachida


Veronique

Intervention de Véronique Marissal de la CEDD


L'alphabétisation à Bruxelles
23 mai 2013

Pendant plusieurs matinées de préparation au sein des Ateliers du Soleil et 3 séances de coaching avec Pascale Binnert, actrice, nos participants ont préparé leur intervention au Parlement, tout comme les autres intervenants pour cette matinée.

Ce furent des moments très riches en émotions, chacun parlant de façon très digne de la difficulté de son parcours de vie, entre rire et larme : le regroupement familial et le déchirement de se voir séparé de la famille au pays d'origine -  la quête inlassable d'un emploi, dans divers pays, pour vivre dignement - l'exil après un mariage forcé.

Ces parcours de vie ont mené les participants en Belgique où ils ont décidé de suivre des cours d'alphabétisation. Car une fois ici, la lutte est loin d'être finie...

Le fait de prendre la parole dans un haut lieu de démocratie, le parlement francophone bruxellois, face à un vaste public de politiciens et de représentants du monde associatif fut une grand moment de stress mais aussi de libération. La parole éclaircit les situations, elle libère car elle dénonce les injustices vécues et témoigne de la dignité et de la persévérance de chacun, quel que soit son parcours.

Le public entier a été touché par les interventions. Rachida, Azzedine et Dialikatou ont été personnellement remerciés avec chaleur et émotion.
L'expérience humaine fut enrichissante pour chacun.

Hélàs, en réponse aux questions, les arguments des politiciens sont souvent le manque de moyens... Nous aurions voulu entendre que des des politiciens courageux se mobilisent pour trouver, là où il y en a, des moyens à consacrer aux plus démunis...


Lettre du Président du Parlement francophone bruxellois, Hamza Fassi-Fihri

"... Vraiment, je saisis l'occasion de ce courrier pour vous remercier et pour vous féliciter. Vos responsables et toute votre équipe avez certainement consacré beaucoup d'heures aux préparatifs de cette matinée. Vous avez secondé et encouragé Rachida, Azzeddine et Dialikatou et cela s'est ressenti lors des prises de parole. Vous engagement à tous force l'admiration..."





 


Azzeddine


Azzeddine


Je m’appelle Azzeddine. J’ai 38 ans.
Je suis espagnol d’origine marocaine.
Je n’ai pas été à l’école au Maroc. Peut être, il n’y a pas de chance pour moi. Mon papa est mort. Ma maman a 5 enfants et pas de moyens.
Je suis sorti de l’école, enfant de 14 ans. Et au Maroc, il n’y a pas beaucoup de formation. La formation, c’est l’expérience.
Je suis parti pour apprendre le métier de menuisier mais c’était difficile pour moi. C’était la première fois que je travaille et c’est dur pour moi. J’ai beaucoup travaillé pour ma maman.
Puis à 20 ans, je suis passé en Espagne pour travailler parce que ma maman a besoin que le travail.
J’ai beaucoup travaillé, longtemps.
Et tout le monde connaît le problème récent de l’Espagne, la crise. Il n’y a plus de travail.
Je suis papa de 3 enfants ; il fallait que je cherche quelque chose.
J’ai un ami ici, je l’ai contacté pour voir s’il y a un travail pour moi. Il a dit que si j’avais de la chance, je pouvais trouver un travail. Mais moi, la première fois, je ne connais rien du français. Je devais toujours trouver quelqu’un pour traduire, pour expliquer quelque chose et tout.
J’ai eu de la chance, j’ai trouvé un travail chez un marocain. Pas besoin de parler.
J’ai travaillé, je suis content et ma famille est contente. C’est la fin des problèmes, mes enfants m’attendent.
Mais après, le patron n’avait plus beaucoup de travail pour moi. Et moi, je respecte, si il n’y a plus, il n’y a plus.
Mais j’avais besoin de faire quelque chose, j’ai commencé à chercher. Mais le problème, c’est que je n’avais pas de contact avec les personnes pour chercher. Comment expliquer que je cherche un travail?
J’avais besoin de quelque chose : une formation.
J’ai rencontré Maria de Lire & écrire et merci. Maria parle espagnol et moi aussi.
Lire & Ecrire m’a envoyé aux Ateliers du Soleil pour apprendre le français. J’apprends depuis 7 mois. La première fois, je ne parle rien du tout !
A l’école, on fait beaucoup pour nous, pour apprendre le français, pour trouver du travail, pour changer ma vie.
La première fois, j’ai eu un déchirement avec ma famille, au Maroc, pour le travail.
Maintenant, c’est très dur, c’est un déchirement avec mes enfants, toujours pour le travail.
J’ai besoin de travailler. J’ai besoin de changer quelque chose, pour moi, pour ma vie, pour ma famille, mes enfants et pour tout.
Je voulais dire merci à l’école Ateliers du Soleil qui est comme une famille pour nous et pour tous les élèves. Et c’est très bien.




Dialikatou


Dialikatou



Je m’appelle Dialikatou Diallo.
J’ai 19 ans.
Je viens de Guinée Conakry.
J’ai une petite fille. Elle a un an et demi.
Lorsque j’étais en Guinée, je vivais avec ma mère et mon père et la co-épouse de ma mère. J’ai 2 sœurs.
En ce temps-là, j’étais à l’école, je faisais 5e année primaire.
En 2012, ma mère est décédée. Mon père et la co-épouse de ma mère ont décidé que je devais arrêter l’école. Je devais aider la co-épouse de ma mère. Je faisais tous les travaux à la maison, le travail et tout.
En ce temps-là, la co-épouse de ma mère a arrangé un mariage, à un garçon que je n’aimais pas, pas du tout.
J’ai dit à mon père « Moi, je n’aime pas ce garçon ! ». Mais il m’a dit « Non, tu dois y aller, il va t’aider à étudier parce que moi, je n’ai pas d’argent pour que tu étudies ». Et j’ai accepté pour ça.
Je suis allée chez cet homme et il avait déjà 3 femmes. Il avait des enfants, plus vieux que moi.
En ce temps-là, je faisais tout et c’était difficile pour moi de vivre.
J’avais une copine. Ma copine m’a aidée. Elle m’a montré quelqu’un. C’est lui qui m’a aidée à venir ici.
Quand je suis arrivée, j’étais au centre fermé et lorsque je suis arrivée, je ne savais pas que j’étais enceinte.
C’était très difficile pour moi. Je ne connaissais rien du tout. Je ne savais pas parler français. Je n’osais même pas parler devant quelqu’un.
En ce temps-là, j’étais au centre et puis j’ai accouché et ils m’ont dit de trouver un appartement avec ma fille.
Je ne connaissais rien du tout. Il fallait que je parle. Ils m’ont dit d’aller là-bas, au CPAS. J’ai une assistante sociale qui m’a dit « Dialikatou, on va t’aider mais toi, tu vas chercher une école et apprendre à l’école, tu vas faire quelque chose toi aussi ». Mon rêve c’est étudier, savoir quelque chose.
Au mois de septembre, j’ai commencé à aller à l’école, en ISP, aux Ateliers du Soleil pour apprendre le français. En ce temps-là, je n’osais même pas parler devant quelqu’un.
Maintenant voilà, je me débrouille un peu pour parler, j’ai été à l’école. J’amène ma fille à la crèche. Elle va bien.
Voilà.





RachidaT



Rachida T.



Je m’appelle Rachida.
Je suis marocaine, née au Maroc, dans une montagne, dans une famille tranquille, sans problème.
On est 6 enfants, on dort dans la même chambre, tranquille, sans problème. Mais pauvre.
A 19 ans, je me suis mariée. Je suis venue en Belgique et quand je suis arrivée ici, je ne comprends rien du tout. Toujours les portes fermées.
Je ne sais rien.
Je ne sais pas ouvrir une lettre recommandée ou une lettre normale. Je ne sais pas lire c’est quoi, ça et ça. Je ne sais pas prendre le métro, rien du tout, ni aller au docteur, à l’avocat, rien du tout.
Toujours la porte fermée.
Après ça, j’ai décidé de chercher une école pour lire et écrire. Et maintenant je suis bien. Je lis, j’écris. J’ai bien appris le français aux Ateliers du Soleil. Avant, je ne savais pas sortir de la maison, prendre le métro ni rien du tout.
Aussi, il m’est arrivé des problèmes comme la dame  à la télé : j’ai commencé à apprendre à conduire. Mon fils m’a aidée à parquer la voiture parce que je ne sais pas. Et puis il m’est arrivé un petit accident. L’autre m’a dit « Madame, il faut remplir les papiers ». Et je ne sais pas lire, j’ai appelé la police.
Quand mon frère est mort, je n’avais pas les papiers pour aller au Maroc et j’ai beaucoup pleuré. Et quand j’ai eu les papiers et que je suis retournée au Maroc, ce n’était plus la même famille avec mes frères, mes sœurs. On ne dort plus dans la même chambre…

Voilà, c’est ça Rachida.
Et merci à tout qui m’apprend à lire et écrire et merci aux Ateliers du Soleil et merci à Iuccia.







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Ecoute attentive, au même rang que les députés...


coach

A côté de la coach, Pascale Binnert, actrice


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Prises de parole...


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Public nombreux et attentif aux différents aspects de la problématique...



radio

Interview pour une Radio...


finale

Photo finale, en présence des participants des Ateliers du Soleil: Rachida, M'feddal, Dialikatou,
Azzeddine, Elise, Imad, Ahmed, Döne - d'Antoine, apprenant à Lire & Ecrire - d'Anne-Chantal Denis,
Aurélie Akerman et Maria Heraz de Lire et Ecrire -  et Hamza Fassi Fihri, président du Parlement francophone bruxellois





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